Chèvres, chevaux, porcs ou encore moutons. Ces animaux peuplent notre territoires par millions mais le grand public ne connait que peu de choses sur ces animaux, y compris leur intelligence. Arte a consacré un documentaire sur ce sujet et met en exergue les capacités des animaux d’élevage.
L’intelligence animale ne se résume ni aux chimpanzés ni aux chiens. Des poissons qui ajustent des quantités pour obtenir une récompense, des chèvres qui reconnaissent les visages et des porcs capables de suivre la « permanence de l’objet » (se représenter un objet même s’il n’est plus là) : partout, la cognition se donne à voir, pour peu qu’on la mesure avec des tests adaptés à la biologie de chaque espèce et non à nos réflexes d’humains. C’est tout l’enjeu des protocoles contemporains (discrimination de signaux, lecture du pointage, tests de préférence et de « biais de jugement ») qui infèrent des états affectifs sans douleur inutile et éclairent le bien-être.
Le message est clair : l’intelligence, c’est d’abord de la plasticité, la capacité à s’ajuster à un environnement changeant. Or nos systèmes d’élevage limitent souvent l’expression de ces capacités. Les milieux pauvres en stimuli n’abrutissent pas les animaux, ils les frustrent et favorisent les stéréotypies : porcs mordillant les barreaux, veaux se léchant jusqu’à la lésion. À l’inverse, solliciter l’esprit améliore santé et sociabilité. Des exemples existent : structures en hauteur pour les chèvres grimpeuses, substrats d’exploration et matériaux manipulables pour les porcs, perchoirs et bains de poussière pour les volailles ; même l’alimentation peut devenir « cognitive », comme ces nourrissages individualisés déclenchés par un signal sonore propre à chaque porc, qui réduisent les conflits.
Pour la recherche (INRAE notamment) et les filières, la voie est connue : appliquer sans transiger les 3R, privilégier des mesures non invasives, laisser « voter » les animaux par des tests de préférence, puis concevoir bâtiments et routines comme de vrais environnements d’apprentissage. Reconnaître la sensibilité et les aptitudes cérébrales des animaux d’élevage ne condamne pas l’élevage ; cela l’oblige. Leur offrir des conditions compatibles avec ce qu’ils savent faire (explorer, choisir, apprendre), c’est à la fois de l’éthique, de la prévention sanitaire et, tout simplement, du respect.
