Des primates contrôlent une chaise roulante par la pensée

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Grâce à un implant cérébral, des primates sont parvenus à diriger une chaise roulante par la pensée. Une avancée majeure concernant les interfaces cerveau-machine qui profiterait énormément aux personnes paraplégiques.

L’année 2016 se termine et à cette occasion, nous avons choisi de revenir sur une avancée majeure en recherche animale. Celle-ci concerne le domaine de la paraplégie et du contrôle cérébral des objets, et a été publiée dans Nature début mars 2016. Des chercheurs du Duke Center for Neuroengineering de l’Université de Duke (Caroline du Nord, Etats-Unis) sont parvenus à ce que des primates commandent une chaise roulante simplement par la pensée, grâce à un système sans fil.

Pour ce faire, ils ont implanté des centaines de microélectrodes aussi fines qu’un cheveu dans le cerveau de deux macaques rhésus. Ces microélectrodes enregistraient en continu l’activité neuronale des primates, chaque microélectrode étant capable de capter les signaux de 300 neurones. Les chercheurs ont alors fixé les macaques à une chaise roulante, et enregistré leur activité cérébrale alors que ceux-ci désiraient se déplacer vers un endroit précis, en l’occurrence vers le bol de raisins disposé à l’autre bout de la pièce. Les scientifiques ont contrôlé la chaise roulante à distance pour réaliser le souhait de déplacement du singe. Là, ils ont pu identifier quels neurones étaient impliqués dans la décision de se diriger vers le bol, et programmer une interface cerveau-machine pour que la chaise roulante se déplace selon les pensées du singe. Rattachés à la chaise, les macaques sont alors parvenus à amener l’engin jusqu’au bol de raisins simplement grâce à leurs pensées. Mieux encore : au fil du temps, les chercheurs n’ont plus eu besoin d’attacher les singes à la chaise, ceux-ci avaient compris qu’ils pouvaient aller où ils voulaient (et notamment vers le bol de raisins) une fois sur cette chaise.

 “Ce fauteuil roulant était assimilé par le cerveau comme une extension du corps du singe”, précise ainsi le Dr Miguel Nicolelis, auteur principal de l’étude. Au fil des expériences, les singes ont appris à mieux contrôler la chaise roulante et à se diriger plus rapidement vers les raisins. L’équipe a même découvert que les signaux cérébraux des singes semblaient évaluer la distance qui séparait la chaise roulante du bol de raisins, signe d’une grande flexibilité cérébrale.

Un grand pas dans le domaine du contrôle cérébral à distance

Selon Miguel Nicolelis, cette interface cerveau-machine est une avancée importante pour les personnes ayant perdu leur mobilité, que ce soit à cause d’une tétraplégie ou de la maladie de Charcot (ou sclérose latérale amyotrophique). “Chez certaines personnes sévèrement handicapées, même cligner des yeux n’est pas possible”, souligne le Dr Nicolelis. “Pour eux, utiliser un fauteuil roulant ou un autre dispositif contrôlé par un appareil de mesure cérébrale non invasif (comme un électroencéphalogramme, ndlr) n’est pas toujours suffisant. Nous avons montré ici clairement que si vous avez des implants intracrâniens, vous obtenez un meilleur contrôle du fauteuil qu’avec un système non invasif.”

Si d’autres travaux ont récemment débouché sur des avancées dans le domaine de la paraplégie (notamment la mise au point d’une prothèse de bras commandée par la pensée, d’un exosquelette ou encore d’un système pour commander mentalement un curseur d’ordinateur), c’est la première fois que des chercheurs parviennent à un tel contrôle à distance d’un objet, qui permet à l’animal de se déplacer dans l’espace via un appareil mobile tel qu’un fauteuil roulant.

L’équipe tente désormais d’améliorer davantage la précision de l’implant et du mouvement, avant de passer aux essais sur l’Homme. Ils ont déjà mis au point des microélectrodes capables d’enregistrer l’activité de plus de 2 000 neurones chacune.

Enfin, notons que si cette étude a été menée sur le macaque rhésus, c’est parce qu’il s’agit d’un primate proche de l’Homme au niveau du fonctionnement cérébral, avec une motricité principalement corticale, comme nous l’avait expliqué Erwan Bézard, suite à la publication de son étude ayant permis à des primates paralysés de marcher à nouveau.

Hélène Bour

En savoir plus :

https://www.sciencedaily.com/releases/2016/03/160303094320.htm

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